« Le cinéma est l’écriture moderne dont l’encre est la lumière » disait Jean Cocteau. En cette période préhivernale, alors que l’ensoleillement en est réduit à sa plus simple expression et qu'une vague de froid nous surprend au détour, Tënk vous invite à retrouver un peu de lumière à travers quatre propositions documentaires pensées pour éclairer l’esprit et réchauffer le cœur. De la beauté pure, en images, en mots, en musique!
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Dans un bouleversant passage du lumineux documentaire Ôte-toi de mon soleil présenté cette semaine, Joseph s’interroge sur le phénomène qui permet le transfert de l’énergie d’un corps à un autre. Si la conductibilité le rend possible par contact direct dira-t-il, il existe également un second mode de transfert : le rayonnement. Au fil de sa conversation téléphonique avec son amie réalisatrice, il lui confiera candidement : « Vous avez sur moi une influence par rayonnement, à distance, comme le soleil. »
Et si le documentaire possédait lui aussi une influence par rayonnement, capable de traverser le temps et l’espace pour éclairer nos vies? Sans prétendre être des scientifiques aguerris, nous croyons que cette théorie mérite d'être mise à l'épreuve, validée et célébrée... Bonne expérimentation!
Avec beaucoup de simplicité et de pudeur, la cinéaste Messaline Raverdy nous offre la chance d'être témoins privilégié·e·s de la relation qu’elle développe avec Joseph, un homme âgé atteint du syndrome de Diogène, une tendance à l’accumulation compulsive. À travers leurs conversations et les kilos de papiers disparates et d’objets en tout genre qui embourbent son petit appartement, Joseph se dévoile tout en douceur, avec beaucoup d'humour et de candeur. Au-delà du simple portrait, Ôte-toi de mon soleil retrace la traversée du siècle de cet être exceptionnel; une exploration poétique de la mémoire, de l’identité et de la solitude, capturant les nuances sensibles d’une relation humaine naissante entre la cinéaste et son sujet.
Archéologie de la lumière est peut-être le plus beau documentaire québécois des dernières années! Le grand cinéaste Sylvain L'Espérance nous invite à s'immerger au cœur des paysages de la Minganie, un territoire peuplé de multiples présences, où chaque reflet de lumière y fait évoluer notre perception du monde. Le film nous rappelle la richesse d’un regard attentif, capable de se synchroniser avec les flux du vent, la danse des nuages et la lumière du soleil qui change sans cesse. À l’heure où les images et les récits se trouvent de plus en plus façonnés par l’intelligence artificielle, Archéologie de la lumière devient un rappel essentiel de la beauté et de la complexité du monde réel; un appel à mieux percevoir pour mieux ressentir.
Rythmes sautillants, refrains accrocheurs et mélodies imagées : les chansons d’Oscar Thiffault oscillent entre le country et le folklore québécois. Plus qu’un simple chanteur, Thiffault est un véritable conteur et témoin de son époque. Dans ce documentaire ludique enrichi d’extraits d’archives, le cinéaste Serge Giguère dresse le portrait d’un artiste modeste et lumineux, qui retourne au Rapide‑Blanc — lieu emblématique ayant inspiré sa célèbre chanson — pour rejouer et revivre son histoire. Avec sincérité et complicité, Giguère capture à la fois l’humour, la sensibilité et l’humanité de Thiffault, nous offrant un hommage vivant à l’oralité et au patrimoine musical québécois.
« Monsieur le Directeur… », c'est ainsi que commencent les lettres adressées à la radio publique belge entre 1958 et 1968. Entre plaintes, questions et suggestions d’auditeur·trice·s, ce documentaire sonore de Corinne Dubien explore la métamorphose de la radio, de relais de la parole officielle à espace d’émancipation et de divertissement. À travers une sélection de lettres entrelacée à des archives de la radio d’alors, cette oeuvre audio explore les façons de faire et d’écouter la radio, et nous interroge sur la place qu’elle occupe aujourd’hui dans nos vies.