Une plongée dans l’œuvre de l’une des réalisatrices les plus importantes à avoir documenté les luttes anticoloniales.
La cinéaste franco-libanaise Jocelyne Saab (1948-2019) a consacré sa vie à témoigner, consciente des actions et des images nécessaires pour contrer la violence historique. Née dans une famille bourgeoise chrétienne, elle grandit à Beyrouth, à quelques kilomètres des camps de réfugiés palestiniens dont elle sera rapidement sensible à la cause. Engagée politiquement, elle fait des études d’économie à Paris avant de devenir journaliste. D’abord reporter de guerre pour la télévision française, elle verra un de ses reportages sur les femmes palestiniennes engagées dans la résistance se faire refuser et censurer par la chaîne publique France 3 pour laquelle elle travaille. Elle se lancera dès lors à son compte, réalisant une œuvre dense, dévouée à la justice, décoloniale dans sa forme et son propos. Elle touchera à tout : reportage, documentaire, essai filmique, fiction, expérimentation vidéo, photographie, installation. Elle travaillera également d’arrache-pied à la préservation de la mémoire cinématographique du Liban avec le projet « Mille et une images » et continuera son œuvre de décolonisation culturelle à travers un festival international de films de résistance culturelle.
L’œuvre de Jocelyne Saab aurait pu être occultée par l’histoire du cinéma, et il aura fallu le travail inestimable d’une association de proches de la cinéaste – l’Association des amis de Jocelyne Saab – pour travailler à reconstituer, restaurer et valoriser son œuvre filmique et ses archives. Dans le texte Itinéraire en pointillés d’un processus de restauration collectif, publié dans un dossier que la revue Hors champ consacrait au cinéma documentaire libanais, Mathilde Rouxel, responsable du projet de restauration des films de Saab et collaboratrice de la cinéaste durant les six dernières années de sa vie, rappelle l’importance cruciale de la circulation de ces images : « Les institutions inventorient, préservent, conservent. Mais pour permettre à l’histoire de s’écrire, les archives doivent être accessibles le plus largement possible. Si l’émotion n’est pas la même lorsqu’on feuillette les notes manuscrites de Jocelyne que lorsqu’on lit leur image scannée sur un écran d’ordinateur, le potentiel du numérique ne doit pas être négligé, particulièrement dans le cas d’une œuvre comme celle de Jocelyne Saab : une œuvre multiculturelle, transnationale, que chacun peut s’approprier et faire parler depuis l’endroit où il se trouve. »
Aujourd’hui, il faut contribuer à faire circuler cette œuvre, ces images, ces discours. Saab parle d’un lieu décimé – elle parle d’exil et de guerre, elle parle de ruines et d’absences. Mais elle parle surtout de résistance, de survie, de dignité. Elle parle d’utopie, de nouvelle société, de mémoire qui ne s’effacera pas, quitte à l’enregistrer sur pellicule – puis à la transférer sur des fichiers numériques – et à la diffuser sur des plateformes en ligne…
Naomie Décarie-Daigneault
Directrice artistique de Tënk
3 produits
En 1982, la maison familiale de Jocelyne Saab, vieille de 150 ans, est la proie des flammes. En collaboration avec le dramaturge libanais Roger Assaf, elle entreprend de sillonner sa ville, assiégée par les Israéliens, et de témoigner de la situation à Beyrouth, du départ des Palestiniens et de l'incompréhension des civils qui souffrent de la guerre.
Portrait de Raymond Eddé, en lice pour les élections présidentielles libanaises, et grand opposant à la guerre confessionnelle. Durant les conflits de 1975-1976, il a recherché activement, avec son équipe, les disparus de guerre, qu’ils soient chrétiens, druzes ou musulmans.
La cinéaste Jocelyne Saab donne la parole aux femmes palestiniennes, victimes souvent oubliées du conflit israélo-palestinien.
En 1982, la maison familiale de Jocelyne Saab, vieille de 150 ans, est la proie des flammes. En collaboration avec le dramaturge libanais Roger Assaf, elle entreprend de sillonner sa ville, assiégée par les Israéliens, et de témoigner de la situation à Beyrouth, du départ des Palestiniens et de l'incompréhension des civils qui souffrent de la guerre.
Portrait de Raymond Eddé, en lice pour les élections présidentielles libanaises, et grand opposant à la guerre confessionnelle. Durant les conflits de 1975-1976, il a recherché activement, avec son équipe, les disparus de guerre, qu’ils soient chrétiens, druzes ou musulmans.
La cinéaste Jocelyne Saab donne la parole aux femmes palestiniennes, victimes souvent oubliées du conflit israélo-palestinien.