Dans les années 60, Jeffrey Paull offre aux jeunes autistes d'un hôpital psychiatrique de l'Ohio l'occasion de se filmer. Muni de ces archives, Mike Hoolboom poursuit son travail : exprimer au grand jour les émotions de ceux et celles que l'autorité et le regard des autres condamnent au silence. Près de 50 ans plus tard, face à ces archives, l'ancienne patiente Donna Washington témoigne des épreuves endurées pour parvenir enfin à se percevoir elle-même.
Réalisateur | Mike Hoolboom |
Acteur | Naomie Décarie-Daigneault |
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Photographie et cinéma ne font pas que refléter la réalité. Ils capturent et transfigurent. Ils dévoilent et trahissent. Ils soulèvent des voiles ou biaisent volontairement. Photographie et cinéma ont un rapport au réel semblable à nos mécanismes psychiques. Dans ce jeu incessant entre représentation et réalité, ils peuvent parfois se substituer aux défenses individuelles, et agir comme un plâtre posé sur le regard. C’est un peu ce à quoi on assiste dans Scrapbook, alors que, dans les années 60, un ami de Hoolboom, Jeffrey Paull, met sur pied un atelier médiatique dans un hôpital psychiatrique pour aider les résidente·s à se re-voir. Quarante ans plus tard, le témoignage de Donna – qui fut résidente de 1966 à 1978 – sur les images capturées à l’époque, dévoile le potentiel quasi alchimique du cinéma.
Les corps des enfants dans l’espace, sans frontières, sans barrières, ne sachant pas qui commence où, les limites de chacun·e, des vases qui débordent. Chaque visage posé comme une énigme, envahi, submergé par les émotions. Ni joie, ni tristesse; raz-de-marée qui écrase tout sur son passage, qui achève la dissolution. « Et si mes yeux refusaient de reconnaître? » s’inquiète Donna. « Et si ce visage qui m’a été rendu par Jeffrey, par son geste photographique qui m’a reconnue, et s’il m’échappait encore? »
L’acte de photographier, filmer, retenir, dévoiler, est ici célébré dans son essence même; ce n’est pas le « ça-a-été » de Barthes, mais le « ça-pourrait-être »; toutes les possibilités de transmutation, transformation et métamorphose contenue dans chacun·e, et le libérant de la fatalité.
Naomie Décarie-Daigneault
Directrice artistique de Tënk
Photographie et cinéma ne font pas que refléter la réalité. Ils capturent et transfigurent. Ils dévoilent et trahissent. Ils soulèvent des voiles ou biaisent volontairement. Photographie et cinéma ont un rapport au réel semblable à nos mécanismes psychiques. Dans ce jeu incessant entre représentation et réalité, ils peuvent parfois se substituer aux défenses individuelles, et agir comme un plâtre posé sur le regard. C’est un peu ce à quoi on assiste dans Scrapbook, alors que, dans les années 60, un ami de Hoolboom, Jeffrey Paull, met sur pied un atelier médiatique dans un hôpital psychiatrique pour aider les résidente·s à se re-voir. Quarante ans plus tard, le témoignage de Donna – qui fut résidente de 1966 à 1978 – sur les images capturées à l’époque, dévoile le potentiel quasi alchimique du cinéma.
Les corps des enfants dans l’espace, sans frontières, sans barrières, ne sachant pas qui commence où, les limites de chacun·e, des vases qui débordent. Chaque visage posé comme une énigme, envahi, submergé par les émotions. Ni joie, ni tristesse; raz-de-marée qui écrase tout sur son passage, qui achève la dissolution. « Et si mes yeux refusaient de reconnaître? » s’inquiète Donna. « Et si ce visage qui m’a été rendu par Jeffrey, par son geste photographique qui m’a reconnue, et s’il m’échappait encore? »
L’acte de photographier, filmer, retenir, dévoiler, est ici célébré dans son essence même; ce n’est pas le « ça-a-été » de Barthes, mais le « ça-pourrait-être »; toutes les possibilités de transmutation, transformation et métamorphose contenue dans chacun·e, et le libérant de la fatalité.
Naomie Décarie-Daigneault
Directrice artistique de Tënk
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