Rodrigue Jean donne la parole à des personne ayant failli se noyer dans les eaux. Le récit de leurs catastrophes et des leçons qu’ils en tirent nous donne à penser que la vie naît de l’eau et qu’elle se poursuit un peu comme une rivière. Nous naissons un peu comme une source puis cette source se transforme en ruisseau, nous traversons des forêts, faisons notre parcours autour des obstacles pour enfin aboutir à la rivière où les eaux se mélangent comme dans une conscience nouvelle et limpide. Il y a un proverbe qui dit _Ce sont les petits ruisseaux qui font les grandes rivières_, comme quoi nous participons tous à constituer quelque chose qui nous dépasse et qui nous porte vers quelque chose de plus grand encore. C’est peut-être ça la voix des rivières, une voix surgie de nos rêves, qui nous parle toute notre vie et qui se fait présente et pressante au moment où nous allons nous fondre dans la rivière, nous qui sommes venus des profondeurs de la terre pour traverser des terres arides et aboutir au destin fluide et limpide d’un parcours sans cesse refait.
Réalisateur | Rodrigue Jean |
Acteur | Claire Valade |
Partager sur |
La voix des rivières a beau être un film de têtes parlantes, il reste beaucoup plus qu’une simple enfilade de gros plans de visages racontant des souvenirs de noyades. C’est un choix cinématographique précis et assumé pour Rodrigue Jean. D’abord, parce que ces cadrages placent à l’avant-plan les voix de ces personnes qui se souviennent, elles-mêmes échos des voix disparues, happées à jamais par les flots — ces deux niveaux de voix, les vivantes et les mortes, donnant leur titre au film. Et puis parce que ces cadrages lui permettent surtout de capter au plus près les émotions qui traversent ses sujets au moment de revivre ces souvenirs d’êtres aimés perdus à la rivière ou de leurs propres expériences de quasi-noyades — dans les tics de leur regard, les tressaillements des plis de leur peau, les hésitations de leur bouche formant ces mots, chacune de ces sensations évoquant un sentiment encore presque surnaturel chez eux. Le cinéaste laisse volontairement ces deux éléments — les voix et les visages — porter son film, lequel demeure particulièrement dépouillé, outre quelques images et gargouillis des cours d’eau ainsi qu’une partition musicale discrète et mélancolique, afin de concentrer l’attention au maximum sur l’écoute et l’observation actives. Il en résulte une œuvre aussi grave que sereine.
Claire Valade
Critique et programmatrice
La voix des rivières a beau être un film de têtes parlantes, il reste beaucoup plus qu’une simple enfilade de gros plans de visages racontant des souvenirs de noyades. C’est un choix cinématographique précis et assumé pour Rodrigue Jean. D’abord, parce que ces cadrages placent à l’avant-plan les voix de ces personnes qui se souviennent, elles-mêmes échos des voix disparues, happées à jamais par les flots — ces deux niveaux de voix, les vivantes et les mortes, donnant leur titre au film. Et puis parce que ces cadrages lui permettent surtout de capter au plus près les émotions qui traversent ses sujets au moment de revivre ces souvenirs d’êtres aimés perdus à la rivière ou de leurs propres expériences de quasi-noyades — dans les tics de leur regard, les tressaillements des plis de leur peau, les hésitations de leur bouche formant ces mots, chacune de ces sensations évoquant un sentiment encore presque surnaturel chez eux. Le cinéaste laisse volontairement ces deux éléments — les voix et les visages — porter son film, lequel demeure particulièrement dépouillé, outre quelques images et gargouillis des cours d’eau ainsi qu’une partition musicale discrète et mélancolique, afin de concentrer l’attention au maximum sur l’écoute et l’observation actives. Il en résulte une œuvre aussi grave que sereine.
Claire Valade
Critique et programmatrice
FR-La voix des rivières