Traces


Image de couverture Traces

Beyrouth, 1980. Au milieu des décombres d’un immeuble en ruines, une bobine de film. Un improbable déploiement de corps queers prend forme, tandis que la ville, déchirée par la guerre et son spectacle de masculinité toxique, vacille et se désintègre.



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Réalisateur

Chantal Partamian

Acteurs

Frédéric SavardFrédéric Savard

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L’amour est queer en temps de guerre civile. Dans cet essai documentaire expérimental de la cinéaste et archiviste libano-arménienne Chantal Partamian, des extraits d’une bobine de film pornographique, retrouvée dans les décombres d’une Beyrouth mise en ruines par la violence destructrice des conflits armés, nous sont graduellement révélés. Ces images érotiques s’opposent à celles de la guerre civile, tournées en vidéo et souvent diffusées à la télévision locale de façon spectaculaire. 
 
Dans un premier temps, la pellicule vinaigrée présente le corps de deux femmes s’adonnant au jeu de la séduction et de l’érotisme. Si l’on peut présumer que cette bobine de film à caractère pornographique a d’abord été conçue pour un public masculin, l’on constate rapidement que Partamian se réapproprie ces images pour subvertir le male gaze et célébrer l’amour queer. Chaque photogramme est donc transformé manuellement par différents procédés chimiques, effaçant la présence masculine afin de mettre l’emphase sur ces deux corps féminins empreints d’une forme de complicité séductrice interdite. Une certaine sensualité émane donc de ce piétage pornographique, que la cinéaste transforme en matière brute dans un détournement esthétique aussi créatif que subversif.  
 
D’autre part, des corps masculins cagoulés menacent la ville, errent à travers le paysage urbain, équipés d’un arsenal aux allures phalliques, nous rappelant la violence machiste et oppressante propre à toute machine de guerre. Ces images vidéo sont aussi manipulées et subverties par Partamian, dans un geste d’affront transformant les actualités en art vidéo. Les soldats se contorsionnent, se pixelisent et finissent enfin par disparaître dans une abstraction analogique cathodique victorieuse. 
 
Finalement, la trame sonore originale composée par Nada Zanhour, alias ncx3, contribue aussi à ce sentiment de résistance face à l’oppression militaire, en mêlant synthétiseurs analogiques et sonorités numériques, faisant écho aux techniques visuelles employées par la cinéaste. Ces sonorités sont à la fois sinistres, menaçantes et triomphantes. Il s’agit de l’une des pièces de musique les plus terrifiantes et envoûtantes que j’ai eu l’occasion d’entendre depuis longtemps.
 
Avec Traces, Chantal Partamian signe une œuvre documentaire singulière, à mi-chemin entre le cinéma expérimental et l’art vidéo, qui célèbre la résilience des communautés queers du Liban, résistant depuis toujours aux tentatives d’effacement et d’enterrement de régimes homophobes. « Faites l’amour, pas la guerre » disait-on autrefois, alors répétons-le encore aujourd’hui, et à jamais.  


 

 

Frédéric Savard
Archiviste et programmateur

 

 


  • Français

    Français

    9 mn

    Langue : Français
  • English

    English

    9 mn

    Langue : English
  • Année 2023
  • Pays Canada, Liban
  • Durée 9
  • Producteur Chantal Partamian
  • Langue Sans dialogues
  • Résumé court Un film pornographique est détourné pour subvertir le regard masculin, célébrer l’amour queer et effacer la violence machiste de la guerre civile libanaise.
  • Ordre 4
  • TLF_Applismb 1
  • Date édito 2025-08-08

L’amour est queer en temps de guerre civile. Dans cet essai documentaire expérimental de la cinéaste et archiviste libano-arménienne Chantal Partamian, des extraits d’une bobine de film pornographique, retrouvée dans les décombres d’une Beyrouth mise en ruines par la violence destructrice des conflits armés, nous sont graduellement révélés. Ces images érotiques s’opposent à celles de la guerre civile, tournées en vidéo et souvent diffusées à la télévision locale de façon spectaculaire. 
 
Dans un premier temps, la pellicule vinaigrée présente le corps de deux femmes s’adonnant au jeu de la séduction et de l’érotisme. Si l’on peut présumer que cette bobine de film à caractère pornographique a d’abord été conçue pour un public masculin, l’on constate rapidement que Partamian se réapproprie ces images pour subvertir le male gaze et célébrer l’amour queer. Chaque photogramme est donc transformé manuellement par différents procédés chimiques, effaçant la présence masculine afin de mettre l’emphase sur ces deux corps féminins empreints d’une forme de complicité séductrice interdite. Une certaine sensualité émane donc de ce piétage pornographique, que la cinéaste transforme en matière brute dans un détournement esthétique aussi créatif que subversif.  
 
D’autre part, des corps masculins cagoulés menacent la ville, errent à travers le paysage urbain, équipés d’un arsenal aux allures phalliques, nous rappelant la violence machiste et oppressante propre à toute machine de guerre. Ces images vidéo sont aussi manipulées et subverties par Partamian, dans un geste d’affront transformant les actualités en art vidéo. Les soldats se contorsionnent, se pixelisent et finissent enfin par disparaître dans une abstraction analogique cathodique victorieuse. 
 
Finalement, la trame sonore originale composée par Nada Zanhour, alias ncx3, contribue aussi à ce sentiment de résistance face à l’oppression militaire, en mêlant synthétiseurs analogiques et sonorités numériques, faisant écho aux techniques visuelles employées par la cinéaste. Ces sonorités sont à la fois sinistres, menaçantes et triomphantes. Il s’agit de l’une des pièces de musique les plus terrifiantes et envoûtantes que j’ai eu l’occasion d’entendre depuis longtemps.
 
Avec Traces, Chantal Partamian signe une œuvre documentaire singulière, à mi-chemin entre le cinéma expérimental et l’art vidéo, qui célèbre la résilience des communautés queers du Liban, résistant depuis toujours aux tentatives d’effacement et d’enterrement de régimes homophobes. « Faites l’amour, pas la guerre » disait-on autrefois, alors répétons-le encore aujourd’hui, et à jamais.  


 

 

Frédéric Savard
Archiviste et programmateur

 

 


  • Français

    Français


    Durée : 9 minutes
    Langue : Français
    9 mn
  • English

    English


    Durée : 9 minutes
    Langue : English
    9 mn
  • Année 2023
  • Pays Canada, Liban
  • Durée 9
  • Producteur Chantal Partamian
  • Langue Sans dialogues
  • Résumé court Un film pornographique est détourné pour subvertir le regard masculin, célébrer l’amour queer et effacer la violence machiste de la guerre civile libanaise.
  • Ordre 4
  • TLF_Applismb 1
  • Date édito 2025-08-08

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