Tourné sur une période de deux ans, _Combat au bout de la nuit_ nous entraîne dans un grand voyage au cœur de la Grèce. C’est là, dans ce pays précipité dans la tourmente par la domination d’une économie totalitaire, qu’émerge aussi chaque jour un refus obstiné de cette violence. Propulsé par des énergies complémentaires et dissonantes, le film est irrigué par un désir de liberté et par la force rebelle de ceux qu’il fait se rencontrer. Qu’ils soient Athéniens ou réfugiés afghans, soudanais, syriens, femmes de ménage ou travailleurs du port licenciés, médecin bénévole ou sans-abri, tous ces hommes et ces femmes, par leur présence et leurs récits, se répondent et tissent entre eux des filiations inattendues. En accompagnant ceux qui, du lieu où ils luttent, forgent un autre avenir, _Combat au bout de la nuit_ est traversé par l'intuition profonde que dans le chaos du présent, un monde commun aux contours encore indéfinis cherche à naître.
Réalisateur | Sylvain L'Espérance |
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L’immigrant que je suis, bien installé dans son pays d’accueil, regarde avec un mélange d’appréhension et de culpabilité du survivant la file de réfugiés arrivant d’Afghanistan, du Bangladesh, du Mali, de la Libye, de la Syrie. C’est la force du film : il crée l’espace et le temps nécessaires pour les accompagner. Comme pour savoir combien d’eau il reste dans leur cantine avant la traversée du désert, on absorbe tous les détails, les vêtements, le couvre-chef, le maigre bagage… Les paysages anonymes que les réfugiés parcourent rappellent les sentiers poussiéreux de Pasolini : « Le pouvoir de la civilisation de la consommation réussit à détruire les réalités particulières, en ôtant la réalité aux diverses manières d’être des hommes. »
Ailleurs, mais pas loin, dans les rues d’Athènes, se déroule le combat de femmes employées pour faire le ménage dans des bureaux de ministères et congédiées au nom de l’austérité. Des porte-conteneurs - gigantesques jouets Lego des puissants – traversent l’image. Le ton du film nous fait penser à la voix d’un oracle de la Grèce antique, terme qui désignait également le « fait d’informer ».
Sur fond couleur de nuit, l’envoutant cinéma de Sylvain L’Espérance allume un mot qu’on ose à peine prononcer, tellement il est galvaudé : solidarité.
Carlos Ferrand
Cinéaste
L’immigrant que je suis, bien installé dans son pays d’accueil, regarde avec un mélange d’appréhension et de culpabilité du survivant la file de réfugiés arrivant d’Afghanistan, du Bangladesh, du Mali, de la Libye, de la Syrie. C’est la force du film : il crée l’espace et le temps nécessaires pour les accompagner. Comme pour savoir combien d’eau il reste dans leur cantine avant la traversée du désert, on absorbe tous les détails, les vêtements, le couvre-chef, le maigre bagage… Les paysages anonymes que les réfugiés parcourent rappellent les sentiers poussiéreux de Pasolini : « Le pouvoir de la civilisation de la consommation réussit à détruire les réalités particulières, en ôtant la réalité aux diverses manières d’être des hommes. »
Ailleurs, mais pas loin, dans les rues d’Athènes, se déroule le combat de femmes employées pour faire le ménage dans des bureaux de ministères et congédiées au nom de l’austérité. Des porte-conteneurs - gigantesques jouets Lego des puissants – traversent l’image. Le ton du film nous fait penser à la voix d’un oracle de la Grèce antique, terme qui désignait également le « fait d’informer ».
Sur fond couleur de nuit, l’envoutant cinéma de Sylvain L’Espérance allume un mot qu’on ose à peine prononcer, tellement il est galvaudé : solidarité.
Carlos Ferrand
Cinéaste
FR- Combat au bout de la nuit
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