C'est le jour du Concours. Les aspirant·e·s cinéastes franchissent le lourd portail de La Fémis pour la première fois. Chacun·e rêve de cinéma, mais aussi de réussite. Tous les espoirs sont permis, toutes les angoisses aussi. Les jurys s'interrogent et cherchent leurs dignes héritier·ère·s. De l'arrivée des candidat·e·s aux délibérations des juré·e·s, le film explore la confrontation entre deux générations et le difficile parcours de sélection qu'organisent nos sociétés.
Réalisateurs | Claire Simon, Claire Simon |
Acteurs | Naomie Décarie-Daigneault, Naomie Décarie-Daigneault |
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Claire Simon a enseigné 10 ans à La Fémis, à la tête du département de réalisation. C’est donc dire que lorsqu’elle s’est attelée à suivre le processus de sélection des futur·e·s étudiant·e·s de cette institution d’élite, elle connaissait la créature de l’intérieur. Filmant les différentes étapes de passation du concours (épreuves écrites, oraux, tournages, épreuves de dessin), la cinéaste s’attarde particulièrement – et très justement – aux juré·e·s; des professionnel·le·s du cinéma représentant les départements d’enseignement.
Y deviennent donc décryptés et mis au jour toute une série de rituels (la présélection, l’entrée dans l’auditorium imposant et bondé, le sérieux des procédures, le temps imparti aux épreuves), de mécanismes psychologiques (projections, idéalisations, aversions) et de mécanismes sociologiques (reproduction des classes, biais inconscients, sexisme intériorisé) qui conduisent un milieu à sélectionner ses héritier·ière·s. On assiste, bouche bée, aux coulisses d’un processus qui se donne normalement des airs de neutralité et de critères objectifs. Voici donc enfin dévoilé ici ce qui se nomme de plus en plus dans le milieu du cinéma : la définition de la qualité est nécessairement culturelle, n’en déplaise à celleux qui essentialisent encore le génie et le mérite!
Et c’est absolument fascinant de voir les cultures à l’œuvre. Qui cherche à encenser quoi? Qui se projette dans quel comportement? Quelles amertumes teintent une appréciation? Quels comportements ou traits untel cherche à voir triompher? La cohérence et la distance (qu’on s’attendrait à voir balisées dans un tel processus!) en prennent pour leur rhume, et les batailles internes qui finissent par interroger les mécaniques de sélection nous en disent beaucoup sur le milieu de l’art et avec quels vieux réflexes il se coltine encore.
S’il est impossible de prétendre qu’un jour, on réussirait à admettre des candidat·e·s sur des bases tout à fait représentatives (et encore, face à quoi?) et éthiques, n’empêche que plusieurs stratégies peuvent être déployées pour atténuer les biais (anonymisation du processus, équité et représentativité autant dans les juré·e·s que dans les candidat·e·s, diversification des méthodes d’évaluation, etc.). Espérons que l'exercice de réflexivité permis par le film ait pu servir de petit examen de conscience. Il est parfois nécessaire qu'une institution se mette elle-même à l'examen!
Naomie Décarie-Daigneault
Directrice artistique de Tënk
Claire Simon a enseigné 10 ans à La Fémis, à la tête du département de réalisation. C’est donc dire que lorsqu’elle s’est attelée à suivre le processus de sélection des futur·e·s étudiant·e·s de cette institution d’élite, elle connaissait la créature de l’intérieur. Filmant les différentes étapes de passation du concours (épreuves écrites, oraux, tournages, épreuves de dessin), la cinéaste s’attarde particulièrement – et très justement – aux juré·e·s; des professionnel·le·s du cinéma représentant les départements d’enseignement.
Y deviennent donc décryptés et mis au jour toute une série de rituels (la présélection, l’entrée dans l’auditorium imposant et bondé, le sérieux des procédures, le temps imparti aux épreuves), de mécanismes psychologiques (projections, idéalisations, aversions) et de mécanismes sociologiques (reproduction des classes, biais inconscients, sexisme intériorisé) qui conduisent un milieu à sélectionner ses héritier·ière·s. On assiste, bouche bée, aux coulisses d’un processus qui se donne normalement des airs de neutralité et de critères objectifs. Voici donc enfin dévoilé ici ce qui se nomme de plus en plus dans le milieu du cinéma : la définition de la qualité est nécessairement culturelle, n’en déplaise à celleux qui essentialisent encore le génie et le mérite!
Et c’est absolument fascinant de voir les cultures à l’œuvre. Qui cherche à encenser quoi? Qui se projette dans quel comportement? Quelles amertumes teintent une appréciation? Quels comportements ou traits untel cherche à voir triompher? La cohérence et la distance (qu’on s’attendrait à voir balisées dans un tel processus!) en prennent pour leur rhume, et les batailles internes qui finissent par interroger les mécaniques de sélection nous en disent beaucoup sur le milieu de l’art et avec quels vieux réflexes il se coltine encore.
S’il est impossible de prétendre qu’un jour, on réussirait à admettre des candidat·e·s sur des bases tout à fait représentatives (et encore, face à quoi?) et éthiques, n’empêche que plusieurs stratégies peuvent être déployées pour atténuer les biais (anonymisation du processus, équité et représentativité autant dans les juré·e·s que dans les candidat·e·s, diversification des méthodes d’évaluation, etc.). Espérons que l'exercice de réflexivité permis par le film ait pu servir de petit examen de conscience. Il est parfois nécessaire qu'une institution se mette elle-même à l'examen!
Naomie Décarie-Daigneault
Directrice artistique de Tënk
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