Dans un institut canadien, 12 enfants vivant avec des troubles émotionnels sont soumis à un traitement expérimental. Pendant 7 semaines, le réalisateur Allan King filmera leur quotidien, caméra à l'épaule.
Réalisateur | Allan King |
Partager sur |
Warrendale était une institution en banlieue de Toronto qui accueillait des jeunes souffrant de troubles émotionnels. Partageant leur quotidien avec des membres du personnel, les enfants étaient placés par groupe de 12, séparés de leur famille, et soumis à un traitement expérimental prônant la contention physique pour laisser libre cours aux pulsions agressives retenues. Si Allan King a choisi d’y poser sa caméra, ce n’était pas pour faire l’apologie des méthodes psychiatriques défendues par l’institution. Il s’agissait davantage d’utiliser cet espace éminemment chargé pour témoigner de l’intensité dramatique qui s’y déployait à travers les interactions entre le personnel soignant et les enfants résidants, sans jugement, sans commentaire, sans explication.
Warrendale est une œuvre difficile à regarder. Les traitements proposés semblent assez peu défendables aujourd’hui. Mais la proposition cinématographique est d’une modernité, d’une franchise et d’une audace qui témoignent notamment de l’époque; 1967. Émergeant d’une tradition cinématographique rigide, distante, guindée, le « cinéma-vérité » (ou cinéma direct au Québec) fait exploser tous les cadres. On cherche à atteindre tout ce qui était auparavant retenu. Orgie d’intensité, débordement d’expérimentations, déferlement de réel sans tabou… Warrendale encapsule une époque où le barrage cédait sous la pression. Si la méthode de contention visait à permettre à l’enfant « d’exprimer ses sentiments les plus intérieurs et les plus terrifiants dans un contexte où l'amour et la sollicitude se manifestent physiquement », le film semble témoigner du même processus. Sous l’encadrement de la caméra, dans les limites du cadre qui s’approche au plus près de l’hystérie, ce sont les forces vives des pulsions qui avaient été refoulées pendant tant d’années qui s’expriment dans une intensité difficilement recevable pour le ou la spectateur.trice.
S’il est tentant de juger Warrendale à l’aune de notre morale, je crois sincèrement qu’il faut plutôt y voir un document clé pour saisir à quel point les années 60 ont marqué un tournant majeur dans l’expression psychique individuelle et collective et les volontés de l’époque pour s’affranchir des entraves de l’ancien monde. Les enfants sont ici les protagonistes d’une révolution qui se jouait à la fois dans les rues et dans les psychés. Une libération intranquille, vitale et explosive!
Naomie Décarie-Daigneault
Directrice artistique de Tënk
Warrendale était une institution en banlieue de Toronto qui accueillait des jeunes souffrant de troubles émotionnels. Partageant leur quotidien avec des membres du personnel, les enfants étaient placés par groupe de 12, séparés de leur famille, et soumis à un traitement expérimental prônant la contention physique pour laisser libre cours aux pulsions agressives retenues. Si Allan King a choisi d’y poser sa caméra, ce n’était pas pour faire l’apologie des méthodes psychiatriques défendues par l’institution. Il s’agissait davantage d’utiliser cet espace éminemment chargé pour témoigner de l’intensité dramatique qui s’y déployait à travers les interactions entre le personnel soignant et les enfants résidants, sans jugement, sans commentaire, sans explication.
Warrendale est une œuvre difficile à regarder. Les traitements proposés semblent assez peu défendables aujourd’hui. Mais la proposition cinématographique est d’une modernité, d’une franchise et d’une audace qui témoignent notamment de l’époque; 1967. Émergeant d’une tradition cinématographique rigide, distante, guindée, le « cinéma-vérité » (ou cinéma direct au Québec) fait exploser tous les cadres. On cherche à atteindre tout ce qui était auparavant retenu. Orgie d’intensité, débordement d’expérimentations, déferlement de réel sans tabou… Warrendale encapsule une époque où le barrage cédait sous la pression. Si la méthode de contention visait à permettre à l’enfant « d’exprimer ses sentiments les plus intérieurs et les plus terrifiants dans un contexte où l'amour et la sollicitude se manifestent physiquement », le film semble témoigner du même processus. Sous l’encadrement de la caméra, dans les limites du cadre qui s’approche au plus près de l’hystérie, ce sont les forces vives des pulsions qui avaient été refoulées pendant tant d’années qui s’expriment dans une intensité difficilement recevable pour le ou la spectateur.trice.
S’il est tentant de juger Warrendale à l’aune de notre morale, je crois sincèrement qu’il faut plutôt y voir un document clé pour saisir à quel point les années 60 ont marqué un tournant majeur dans l’expression psychique individuelle et collective et les volontés de l’époque pour s’affranchir des entraves de l’ancien monde. Les enfants sont ici les protagonistes d’une révolution qui se jouait à la fois dans les rues et dans les psychés. Une libération intranquille, vitale et explosive!
Naomie Décarie-Daigneault
Directrice artistique de Tënk
Français
English