Étude dynamique de la formation de la cellule LE ou cellule de Hargraves (diagnostic du lupus érythémateux aigu disséminé) : action des anticorps antinucléaires sur les noyaux de polynucléaires neutrophiles, chimiotactisme des polynucléaires (formation de rosettes), phagocytose préférentielle du complexe anticorps-noyau (formation de la cellule LE). (Description des bibliothèques de l'Université de Montréal)
Réalisateurs | Raoul Kourlisky , Roger E. Robineaux |
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Qui a pu voir, dans une salle d’amphithéâtre de l’Université de Montréal ou de la Sorbonne, dans les années 60, Formation de la cellule LE, accompagné du ronron régulier du 16 mm et de la poussière dans la voix du son optique, avec cette récitation très propre débitant avec la blancheur exigée de la neutralité scientifique : « La cellule LE est constituée par une masse homogène centrale dans un polynucléaire normal, etc., etc. »? Qui a bien pu voir ce film, et qu’en a-t-il, ou elle, pensé? Cette projection a-t-elle été la source d’une vocation, d’une passion ou d’un endormissement soudain, devant les mouvements vibratiles cytoplasmiques hypnotisants qui persistent par-delà la phagocytose, enveloppés dans les muqueuses de ce noir et blanc spongieux?
Et nous tous, ici, qui n’avons peut-être pour toute connaissance en matière de biologie cellulaire qu’un nébuleux souvenir de collège, que faire, aujourd’hui, de ce drame, de ce récit de « formation » (le Bildungsroman d’une cellule?) dont on peine à décerner l’enjeu, sur l’échiquier de la morale cellulaire : qui sont les bons, qui sont les méchants ici? Les cellules LE, les polynucléoses, les anticorps?
Ce film ne tombe-t-il donc pas fatalement dans une sorte d’entre-deux du cinéma scientifique? Trop vulgaire pour le savant, trop expert pour le curieux qui n’y voit rien? Ce film ne serait-il alors pour personne? Ne s’adresse-t-il pas plutôt à quiconque voudrait s’en saisir, lui donner un peu de temps et d’attention, qui trouverait l’occasion d’en faire quelque chose, c’est-à-dire autre chose que ce pour quoi il a été conçu : un objet d’histoire, un poème, un film d’horreur composé d’une succession de terribles dévorations.
C’est ici, au début des années 60, il y a plus de 65 ans, que paraît ce bijou étrange de microcinématographie, petit film complètement oublié, sûrement négligeable, retrouvé à la faveur d’une succession incalculable de hasards, qui nous montre qu’on peut toujours s’émerveiller de la violence explosive de l’infiniment petit.
André Habib
Professeur titulaire · Université de Montréal
Département d'histoire de l'art, de cinéma et de médias audiovisuels
et Directeur de la revue Hors champ
Qui a pu voir, dans une salle d’amphithéâtre de l’Université de Montréal ou de la Sorbonne, dans les années 60, Formation de la cellule LE, accompagné du ronron régulier du 16 mm et de la poussière dans la voix du son optique, avec cette récitation très propre débitant avec la blancheur exigée de la neutralité scientifique : « La cellule LE est constituée par une masse homogène centrale dans un polynucléaire normal, etc., etc. »? Qui a bien pu voir ce film, et qu’en a-t-il, ou elle, pensé? Cette projection a-t-elle été la source d’une vocation, d’une passion ou d’un endormissement soudain, devant les mouvements vibratiles cytoplasmiques hypnotisants qui persistent par-delà la phagocytose, enveloppés dans les muqueuses de ce noir et blanc spongieux?
Et nous tous, ici, qui n’avons peut-être pour toute connaissance en matière de biologie cellulaire qu’un nébuleux souvenir de collège, que faire, aujourd’hui, de ce drame, de ce récit de « formation » (le Bildungsroman d’une cellule?) dont on peine à décerner l’enjeu, sur l’échiquier de la morale cellulaire : qui sont les bons, qui sont les méchants ici? Les cellules LE, les polynucléoses, les anticorps?
Ce film ne tombe-t-il donc pas fatalement dans une sorte d’entre-deux du cinéma scientifique? Trop vulgaire pour le savant, trop expert pour le curieux qui n’y voit rien? Ce film ne serait-il alors pour personne? Ne s’adresse-t-il pas plutôt à quiconque voudrait s’en saisir, lui donner un peu de temps et d’attention, qui trouverait l’occasion d’en faire quelque chose, c’est-à-dire autre chose que ce pour quoi il a été conçu : un objet d’histoire, un poème, un film d’horreur composé d’une succession de terribles dévorations.
C’est ici, au début des années 60, il y a plus de 65 ans, que paraît ce bijou étrange de microcinématographie, petit film complètement oublié, sûrement négligeable, retrouvé à la faveur d’une succession incalculable de hasards, qui nous montre qu’on peut toujours s’émerveiller de la violence explosive de l’infiniment petit.
André Habib
Professeur titulaire · Université de Montréal
Département d'histoire de l'art, de cinéma et de médias audiovisuels
et Directeur de la revue Hors champ
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