Trois mémoires – celle de l'Innu, celle du jésuite et celle de Lamothe – se juxtaposent sans se contredire, se définissent sans se nuire, s'évaluent sans se diminuer. Dans ce long métrage, Arthur Lamothe filme le quotidien des Innus et la culture d'un peuple autochtone peu à peu décimé.
Réalisateurs | Arthur Lamothe, Arthur Lamothe |
Acteur | Simon Galiero |
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Fort d’un méticuleux et acharné travail de mémoire et de recueil des paroles autochtones dans un nombre incalculable de films, Arthur Lamothe raconte son passage du constat de la dépossession politique et matérielle des « Amérindiens » ayant mené à cette « clochardisation » classique des populations traditionnelles au contact de l’Occident moderne – terme qu’il emprunte à Germaine Tillion lorsqu’elle décrivait le sort des Kabyles – à celui d’une dépossession plus grave encore : celle de leur riche univers spirituel.
Face à un interlocuteur invisible, Lamothe apparaît parcimonieusement à l’écran tout au long du film pour s’interroger lui-même en quelque sorte, et crée ainsi un type d’interaction singulier, voire unique. Analysant la relativité du point de vue documentaire en général, puis établissant des correspondances entre ses propres films, il montre la façon dont ils se télescopent autour de certains thèmes et dévoile l’évolution de ses préoccupations et le cheminement de ses intentions dans un double mouvement critique et réflexif. Mettant en images et en jeu cette pensée en action (mais en porte-à-faux des considérations strictement théoriques, intellectuelles ou rationalistes, notamment celles de la branche jésuitique du christianisme, pourtant fécond en révélations, apparitions et dimensions oniriques), le film de Lamothe, 40 ans plus tard, apparaît tout aussi vivifiant et inspirant aujourd’hui, dans le flot des nouvelles conventions et des nouveaux mots d’ordre aussi retardataires qu’affectés et emphatiques sur les enjeux des nations et cultures autochtones.
Cette dimension spirituelle que Lamothe prend à bras le corps avec ses protagonistes et à travers laquelle il fait rejaillir avec eux la puissance poétique des traditions, nous fait poser un pied comme nul autre film dans cet « autre monde » duquel nous sommes savamment coupés, le cinéaste la restituant dans tous les sens du terme avant de révéler, avec sa fascinante séquence finale qui réunit précisément plusieurs niveaux de réalités, à quel point il l’aura prise au sérieux.
Simon Galiero
Réalisateur, auteur et éditeur
du journal documentaire Communs.site
Fort d’un méticuleux et acharné travail de mémoire et de recueil des paroles autochtones dans un nombre incalculable de films, Arthur Lamothe raconte son passage du constat de la dépossession politique et matérielle des « Amérindiens » ayant mené à cette « clochardisation » classique des populations traditionnelles au contact de l’Occident moderne – terme qu’il emprunte à Germaine Tillion lorsqu’elle décrivait le sort des Kabyles – à celui d’une dépossession plus grave encore : celle de leur riche univers spirituel.
Face à un interlocuteur invisible, Lamothe apparaît parcimonieusement à l’écran tout au long du film pour s’interroger lui-même en quelque sorte, et crée ainsi un type d’interaction singulier, voire unique. Analysant la relativité du point de vue documentaire en général, puis établissant des correspondances entre ses propres films, il montre la façon dont ils se télescopent autour de certains thèmes et dévoile l’évolution de ses préoccupations et le cheminement de ses intentions dans un double mouvement critique et réflexif. Mettant en images et en jeu cette pensée en action (mais en porte-à-faux des considérations strictement théoriques, intellectuelles ou rationalistes, notamment celles de la branche jésuitique du christianisme, pourtant fécond en révélations, apparitions et dimensions oniriques), le film de Lamothe, 40 ans plus tard, apparaît tout aussi vivifiant et inspirant aujourd’hui, dans le flot des nouvelles conventions et des nouveaux mots d’ordre aussi retardataires qu’affectés et emphatiques sur les enjeux des nations et cultures autochtones.
Cette dimension spirituelle que Lamothe prend à bras le corps avec ses protagonistes et à travers laquelle il fait rejaillir avec eux la puissance poétique des traditions, nous fait poser un pied comme nul autre film dans cet « autre monde » duquel nous sommes savamment coupés, le cinéaste la restituant dans tous les sens du terme avant de révéler, avec sa fascinante séquence finale qui réunit précisément plusieurs niveaux de réalités, à quel point il l’aura prise au sérieux.
Simon Galiero
Réalisateur, auteur et éditeur
du journal documentaire Communs.site
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