C’est une histoire vieille comme le monde et pourtant chaque jour plus actuelle. Et chaque jour plus terrible. Il y a des pauvres qui, au mépris de leur vie, parfois doivent tout quitter pour tenter d’aller survivre, vivre ailleurs. Dans ce film–ci, l’ailleurs, c’est l’Amérique du Nord, et les pauvres sont pour la plupart des Mexicains. Ils sont passés pendant des années par San Diego, mais le service d’immigration américain qui se sert des technologies les plus avancées pour les arrêter a réussi à arrêter le flux des illégaux dans cette partie de la Californie et à le déporter dans les régions désertiques et montagneuses de l’Arizona. Là, ils ont cru que les difficultés, les dangers, le froid et la chaleur les arrêteraient. On n’arrête pas quelqu’un qui a faim. Mais on en a peur. Peur de l’autre, peur de sa souillure, peur des maladies qu’il peut apporter avec lui. Peur d’être envahi. Mais on n’a pas peur de le tuer.
Réalisateur | Chantal Akerman |
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"De l'autre côté" fonctionne en diptyque avec un film présenté dans ce Fragment d'une œuvre, "Sud", mais aussi en triptyque avec cet autre film d'Akerman, "D'Est" — les continuités et discontinuités spatiales, le présent et le temps long de l'Histoire. Chantal Akerman traite à la fois de l'imaginaire et de la matérialité de la frontière entre le Mexique et l'Amérique du Nord, des rêves hollywoodiens qui brillent de l'autre côté et de la réalité au mieux triviale, trop souvent terrible, mortifère, révoltante. La cinéaste se concentre souvent sur les paysages, quelquefois sur les corps et la parole, organisant une circulation intense entre eux, des rebonds avec d'autres pans historiques tragiques, non par l'équivalence littérale mais sous la forme de l'écho imparable et glaçant. Ce grand pamphlet politique est aussi d'une désespérante actualité, confirmant s'il en était besoin que la violence est la grande malédiction étasunienne.
Arnaud Hée
Programmateur, enseignant et critique
"De l'autre côté" fonctionne en diptyque avec un film présenté dans ce Fragment d'une œuvre, "Sud", mais aussi en triptyque avec cet autre film d'Akerman, "D'Est" — les continuités et discontinuités spatiales, le présent et le temps long de l'Histoire. Chantal Akerman traite à la fois de l'imaginaire et de la matérialité de la frontière entre le Mexique et l'Amérique du Nord, des rêves hollywoodiens qui brillent de l'autre côté et de la réalité au mieux triviale, trop souvent terrible, mortifère, révoltante. La cinéaste se concentre souvent sur les paysages, quelquefois sur les corps et la parole, organisant une circulation intense entre eux, des rebonds avec d'autres pans historiques tragiques, non par l'équivalence littérale mais sous la forme de l'écho imparable et glaçant. Ce grand pamphlet politique est aussi d'une désespérante actualité, confirmant s'il en était besoin que la violence est la grande malédiction étasunienne.
Arnaud Hée
Programmateur, enseignant et critique