À la fin du générique d’Animal macula, on peut lire : « Travaux en cours. » Je voulais signifier par là que le processus entamé avec le film n’était pas terminé et que la réflexion continuait à évoluer.
L’occasion qui m’est offerte par la présente Escale me permet de prolonger le travail d’une autre manière. Les films que j’ai choisis soulèvent un questionnement fécond quant à notre rapport aux animaux et à leur représentation. Une de mes préoccupations durant le montage d’Animal macula était de trouver un espace de liberté ou une possibilité de libération pour les animaux représentés par les images. Comment s’accorder à leur force originelle afin de renverser le sort que leur réservaient les films, tout en nous faisant témoins de leur réelle condition ? Les quatre films présentés ici sont, chacun à leur façon, habités par ces mêmes préoccupations.
Ressources de Serge-Olivier Rondeau et Hubert Caron-Guay s’ouvre aux doléances silencieuses des êtres engagées dans la production des abattoirs. Western Sunburn de Karl Lemieux met les bêtes à l’avant plan en pulvérisant les figures iconiques du western américain. Particles de Charles-André Coderre agit à la fois comme un appel à la libération et une célébration des formes du vivant. Bêtes en miettes de Muriel Pic plonge dans les archives du siècle dernier, cherchant à redonner une véritable existence aux animaux pris au piège de notre emprise sur eux et leurs représentations.
L’œuvre littéraire de Muriel Pic, a été pour moi une source d’inspiration, et tout particulièrement son livre En regardant le sang des bêtes, dont le dernier chapitre est consacré au montage. Ce texte lumineux, il faut le lire en entier. Je me contenterai de citer deux courtes phrases :
« Le montage en appelle donc à la compétence divinatoire de chacun en sollicitant notre capacité à révéler ce qui est latent. [...] Il développe en nous la capacité de reconnaître ce qui porte atteinte à l’intégrité des êtres et réactive en l’homme cette faculté animale qu’est l’intelligence du péril. »
Les réalisations de ce cycle sont portées par cette intelligence-là, qui en fait des films frères. Bien qu’ils se déploient sur des continents éloignés, tous nous invitent à saisir notre puissance d’agir face aux animaux, à leur singularité et à leur destin. Les travaux sont en cours.
Vous êtes convié.es à y participer.
Sylvain L'Espérance
Cinéaste
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Hiver 2018, Amsterdam, constellation du Chien. Je parcours dix-sept kilomètres d’archives à la recherche des bêtes. Six cent vingt-trois fragments de films muets, d’images anonymes, rassemblés par l’Institut du film EYE sous le titre _Bits and Pieces : morceaux et pièces._ Mais pour moi, ce sont les miettes de notre festin des bêtes.
_Western Sunburn_ est une « rephotographie » en vidéo de matériel initialement utilisé pour une performance lors de laquelle Karl Lemieux a peint, gratté et brûlé en direct des boucles d’un vieux film western 16 mm. L’empreinte d’un passé et d’un futur impossibles dans une trajectoire où le présent se désintègre.
Dans un organisme communautaire d’aide à l’emploi, des demandeurs d’asile se font offrir un travail dans des usines d’abattage qui leur permettra de recommencer une vie qu’ils ont dû abandonner abruptement. Dans une ferme d’élevage, vaches, cochons et agriculteurs sont soumis au rythme d'un modèle agricole industriel. Dehors, seuls les plants de maïs qui servent à nourrir les animaux transperce...
_Animal Macula_ nous plonge au coeur d’un réseau tentaculaire et sinueux où les bêtes se métamorphosent en circulant d’un plan à l’autre, tous puisés dans 125 ans de cinéma. Une énigme est contenue dans chaque image où un animal apparaît, diffusée dans les signes que celui-ci nous adresse en silence. Par un travail d’archéologie et de collage, c’est de cette énigme que le film cherche à s’...
Hiver 2018, Amsterdam, constellation du Chien. Je parcours dix-sept kilomètres d’archives à la recherche des bêtes. Six cent vingt-trois fragments de films muets, d’images anonymes, rassemblés par l’Institut du film EYE sous le titre _Bits and Pieces : morceaux et pièces._ Mais pour moi, ce sont les miettes de notre festin des bêtes.
_Western Sunburn_ est une « rephotographie » en vidéo de matériel initialement utilisé pour une performance lors de laquelle Karl Lemieux a peint, gratté et brûlé en direct des boucles d’un vieux film western 16 mm. L’empreinte d’un passé et d’un futur impossibles dans une trajectoire où le présent se désintègre.
Dans un organisme communautaire d’aide à l’emploi, des demandeurs d’asile se font offrir un travail dans des usines d’abattage qui leur permettra de recommencer une vie qu’ils ont dû abandonner abruptement. Dans une ferme d’élevage, vaches, cochons et agriculteurs sont soumis au rythme d'un modèle agricole industriel. Dehors, seuls les plants de maïs qui servent à nourrir les animaux transperce...
_Animal Macula_ nous plonge au coeur d’un réseau tentaculaire et sinueux où les bêtes se métamorphosent en circulant d’un plan à l’autre, tous puisés dans 125 ans de cinéma. Une énigme est contenue dans chaque image où un animal apparaît, diffusée dans les signes que celui-ci nous adresse en silence. Par un travail d’archéologie et de collage, c’est de cette énigme que le film cherche à s’...